omuald est toujours à son poste, les traits tirés mais l’œil encore vif. A se demander avec quelle marque de café il se tient éveillé ?

Philip lui fait résumer la situation.

— Eh bien, voilà où nous en sommes en ce moment, explique-t-il, on sait pourquoi Cassini a appelé directement les flics l’autre jour. Les bagnoles volées qui finissent dans ses vignes ça arrive tout le temps, alors il a pris l’habitude de téléphoner à la gendarmerie parce qu'il sait que c’est la procédure appropriée. Ce qui est intéressant c’est qu’il a raconté ses malheurs à beaucoup de ses clients, par conséquent l’un d’entre eux à pu exploiter l’information.

— Quel genre de client ?

— C’est là que les Athéniens se télescopent patron ! Cassini fournit en picrate de nombreux restaurateurs de la région. Greg et Ann ont établi une liste exhaustive des établissements acheteurs en consultant le facturier de l’exploitation. Ils me l’ont envoyée par e-mail tout à l’heure.

— Et l’équipe numéro deux ?

— Ils sont à côté. En train de trier les habitués du salon de coiffure par métiers. Toujours dans l’idée de recouper avec les marchands de soupe. Mais c’est pas aussi simple que c'en à l’air, il faut reprendre les témoignages un à un.

Comme un lapin de son chapeau, Philip sort le nouveau prospectus de sa poche.

— Et de ça ? Qu’est ce que tu en penses ?

Romuald lit attentivement le menu

— Merde !

— C’est le second service…. Il faut croire que le foldingue n’est pas rassasié de ses crimes.

— Où tu l’as eu ?

— Dans ma boîte aux lettres, avec le journal du matin.

— Merde ! merde ! merde et remerde !

A cet instant D’Ysembert jaillit dans le bureau en brandissant un papier jaune à bout de bras. Il éructe :

— Bordiga ! Bordiga !

C’est le même prospectus qu’il tient entre ses doigts boudinés.

— Bordiga ! Il y avait ça avec le journal ! Qu’est ce que ça veut dire bordel ! Avocat vinaigrette ? Petits soufflés ? Qu’est ce que ça veut dire ces conneries ?

— Euh ! Passez-moi l’expression Chef… mais ça veut dire qu’on n’est pas encore sorti de l’auberge… Il semble bien que notre tueur soit toujours à l’office.

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C’est la première fois… peut-être tu me mens,

mais je me laisse aller au gré du firmament…

ma longue chevelure adoucit notre couche

déjà, mon chérubin, tu dévores ma bouche.

Blottie contre ton corps, je m'abandonne enfin

aux anges diaphanes, aux tendres séraphins

qui m’emportent au loin dans le trouble des limbes

constellés de rosée, d’auréoles, de nimbes…

Plus tard, l’obscurité va gagner du terrain,

les grenouilles crieront, les papillons sereins

viendront se consumer aux torches crépitantes ;

la lune apparaîtra complice et souriante.

Amour... je te cherchais parmi les utopies

j’en perdais mon latin de ta philanthropie

j’étais dans l’ignorance et je ne savais pas

que déjà tu faisais en moi tes premiers pas.

Écrit pour les Impromptus Littéraires

l n’est pas encore midi et le soleil cogne dur quand Philip rejoint son domicile près du Parc Bordelais. Il est sur les rotules mais en voyant sa Julia en train de trafiquer sur l’ordinateur seulement vêtue d’un t-shirt moulant et d’une petite culotte blanche, il sent une bouffée de désir l’envahir et sa fatigue s’évaporer comme par enchantement.

Heureuse de voir son homme à la maison avant l’heure prévue la jeune femme lui saute au cou. Il n’en faut pas plus pour aviver irrépressiblement des libidos quelque peu négligées ces jours ci.

Ils font l’amour passionnément dans l’étroite pièce qui sert de bureau à Julia. Ils se donnent et se prennent trop brièvement mais sans ambages, ni crainte de consomption. Après coup l’épuisement a raison de Philip.

— Je vais me reposer un moment mon amour, je n’en puis plus.

Elle lui bise le nez, il regarde sa montre.

— Une heure, puis tu me réveilles.

— Je te fais à manger pendant ce temps.

— Tu es trop top.

Bordiga a le sommeil mouvementé. Il est assailli par des images oniriques où se succèdent des marmitons toqués évoluant au milieu d’invraisemblables ustensiles de cuisine, agitant des couteaux sanguinolents et se faisant des masques d’escrimeurs à l’aide de chinois effilés.

A l’heure dite Julia le rappelle à la réalité. Tandis qu’ils déjeunent tous les deux Philip passe le courrier en revue. Tout à coup il se demande si son cauchemar n’est pas en train de se poursuivre : au milieu des factures et des enveloppes administratives un papier se signale par son incongruité. Du déjà vu, du malvenu, de la mauvaise publicité qui évoque le pire.

*

Le grand Vatel

◊

Cuisine du marché

cette semaine

◊

avocat en vinaigrette

poulette farcie aux pruneaux

farandole de petits soufflés

omelette norvégienne et sa bombe glacée

◊

Service à compter du 6 juillet

*

Cette fois la coupe est pleine. Bordiga en a sa claque de se faire mener en bateau par le psychopathe frappadingue. Parce que c’est de cela qu’il s’agit, celui qui se cache derrière Vatel se joue de lui comme un chat avec une souris. Mais ça ne va pas se passer comme ça ! A partir de cet instant la guerre devient totale, Philip est décidé de la gagner, coûte que coûte.

Prospectus en poche le commissaire regagne les bureaux de la police criminelle. Il a bien l’intention de ne pas lâcher prise jusqu’à ce que le responsable des meurtres soit identifié et sous les verrous. Depuis qu’il existe des éléments concrets exploitables, l’avantage a changé de camp. Bordiga le sait.

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hilip a l’intuition que le témoignage du garçon a une valeur essentielle.

— Est-ce que tu te rappelles si ce gars avait une voiture ?

— Je sais pas. Vous savez, je l’ai juste aperçu dans les jumelles. Pour moi, sur le moment, il ne présentait pas d’intérêt. S’il n’y avait pas eu sa tenue de golf je ne l’aurais même pas remarqué.

Le jeune homme reste un instant silencieux puis il s’interroge.

— Mais, il me semble que Bono a été agressé hier, pas samedi.

— Tu as de la jugeote toi, c’est bien raisonné. Mais ce bonhomme qui se ballade avec un club de golf, il m’intéresse au plus haut point.

Philip tire une carte de visite de sa poche revolver.

— Si tu te rappelles d’autre chose à propos de ce type, tu téléphones à ce numéro et tu demandes à parler au commissaire principal. Si je ne suis pas là tu peux laisser le message à l’inspecteur Martinez ; c’est mon bras droit.

Thomas se saisit du précieux document avec vénération. Il n’en espérait pas tant. Il va drôlement les scier les copains en leur racontant son histoire, preuves à l'appui !

*

Avant de reprendre le volant le commissaire appelle Romuald qui assure la permanence. C’est quand même pratique le téléphone portable quand on ne l’oublie pas à la maison ! Ça sonne une seule fois et ça décroche.

— Allô !

— Romuald ?

— Oui, c’est vous commissaire ?

— Affirmatif. Comment ça va au bureau ?

— Tout le monde est sur le pont ici. Jeannot vient de récupérer le dossier de la brigade contre-terroriste et Greg m’a appelé de chez Cassini.

— Ça donne quoi ?

— Il m’a dit qu’il cuisinait le vigneron… Je ne sais pas si c’est de l’humour de sa part mais vous savez comment il est !

— Ça donne quoi de ton côté ?

— Pffff… Il y a plus de six cent restaurants à Bordeaux, et je ne sais pas exactement ce qu’il faut que je cherche.

— Fichtre ! Tant que ça !

— Oui. Ça m’a fait pareil. Je les liste quand même, on sait jamais, quelque chose peut se dégager à la fin. Et au moins j’ai l’impression d’être utile.

— Et l’origine des prospectus ?

— J’ai appelé le quotidien Sud-Ouest qui les a fait distribuer, ils font des recherches de leur côté. Ils doivent me tenir informé dans la journée.

— J’ai autre chose à te demander.

— Oui ?

— Débrouille-toi pour obtenir la liste des personnes qui ont une licence dans un club de golf en ville et aux alentours.

Sans s’étonner le moins du monde Romuald répond :

— O.K., je m’en occupe.

— Bon. Je passe tout à l’heure, on fera le point.

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Achète un chat noir et un môme

une vache au pis élastique,

une femme à côté d’un homme

dans un pur esprit d’esthétique,

évoque une idée farfelue

de l'infini rétro-spatial,

convoque un Pope au barbecue,

et des fines de claire spéciales.

Tout ces gentils, mon beau cousin,

ces bestiaux, ces gens, ces mi-saints,

mets les dans un terrain de foot

à plat de leurs espérances :

au coup d'envoi, empile-les !

ça ira au fond des filets !

Voilà voilà...

Ça coûte ce que ça coûte

Mais c’est la solution je pense…

Écrit pour les Impromptus Littéraires