l n’est pas encore midi et le soleil cogne dur quand Philip rejoint son domicile près du Parc Bordelais. Il est sur les rotules mais en voyant sa Julia en train de trafiquer sur l’ordinateur seulement vêtue d’un t-shirt moulant et d’une petite culotte blanche, il sent une bouffée de désir l’envahir et sa fatigue s’évaporer comme par enchantement.
Heureuse de voir son homme à la maison avant l’heure prévue la jeune femme lui saute au cou. Il n’en faut pas plus pour aviver irrépressiblement des libidos quelque peu négligées ces jours ci.
Ils font l’amour passionnément dans l’étroite pièce qui sert de bureau à Julia. Ils se donnent et se prennent trop brièvement mais sans ambages, ni crainte de consomption. Après coup l’épuisement a raison de Philip.
— Je vais me reposer un moment mon amour, je n’en puis plus.
Elle lui bise le nez, il regarde sa montre.
— Une heure, puis tu me réveilles.
— Je te fais à manger pendant ce temps.
— Tu es trop top.
Bordiga a le sommeil mouvementé. Il est assailli par des images oniriques où se succèdent des marmitons toqués évoluant au milieu d’invraisemblables ustensiles de cuisine, agitant des couteaux sanguinolents et se faisant des masques d’escrimeurs à l’aide de chinois effilés.
A l’heure dite Julia le rappelle à la réalité. Tandis qu’ils déjeunent tous les deux Philip passe le courrier en revue. Tout à coup il se demande si son cauchemar n’est pas en train de se poursuivre : au milieu des factures et des enveloppes administratives un papier se signale par son incongruité. Du déjà vu, du malvenu, de la mauvaise publicité qui évoque le pire.
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Le grand Vatel
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Cuisine du marché
cette semaine
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avocat en vinaigrette
poulette farcie aux pruneaux
farandole de petits soufflés
omelette norvégienne et sa bombe glacée
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Service à compter du 6 juillet
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Cette fois la coupe est pleine. Bordiga en a sa claque de se faire mener en bateau par le psychopathe frappadingue. Parce que c’est de cela qu’il s’agit, celui qui se cache derrière Vatel se joue de lui comme un chat avec une souris. Mais ça ne va pas se passer comme ça ! A partir de cet instant la guerre devient totale, Philip est décidé de la gagner, coûte que coûte.
Prospectus en poche le commissaire regagne les bureaux de la police criminelle. Il a bien l’intention de ne pas lâcher prise jusqu’à ce que le responsable des meurtres soit identifié et sous les verrous. Depuis qu’il existe des éléments concrets exploitables, l’avantage a changé de camp. Bordiga le sait.